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mardi 17 avril 2018

Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France ont frappé la Syrie



LES ÉTATS-UNIS, LE ROYAUME-UNI ET LA FRANCE ONT FRAPPÉ LA SYRIE

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps

            
Le secrétaire à la défense James Mattis et le General Joseph Dunford

          Après une période d’hésitation ou de préparation technique, les États-Unis ont frappé les sites d'armes chimiques syriens, en collaboration avec le Royaume-Uni et la France. L’annonce a été faire par Donald Trump lui-même : «J'ai ordonné aux forces armées américaines de lancer des frappes de précision sur des cibles associées aux capacités d'armes chimiques du dictateur syrien de Bachar el-Assad. Le but de la campagne est d'établir un puissant moyen de dissuasion contre la production, la propagation et l'utilisation d'armes chimiques».



Cellule de crise française pendant les frappes

            Des explosions ont été entendues à Damas, Homs et ailleurs en Syrie. Un responsable américain a précisé que les attaques ont été effectuées par des missiles de croisière Tomahawk. En effet, plusieurs transporteurs de missiles de croisière avaient été déployés dans les mers de la Méditerranée et de la mer Rouge. Des avions de chasse sont intervenus depuis les énormes bases aériennes américaines dans les pays du Golfe tandis que des bombardiers B-1 larguaient des missiles à longue portée sur des cibles.
          De la mer Rouge, l'USS Monterey a lancé 30 missiles Tomahawk et l'USS Laboon en a tiré 7. À partir du golfe du Nord, l'USS Higgins a lancé 23 missiles Tomahawk. De l'est de la Méditerranée, l'USS John Warner a tiré six missiles Tomahawk et une frégate française a lancé trois missiles navals SCALP.
Theresa May

            Le Premier ministre britannique, Theresa May, a confirmé la participation de la Grande-Bretagne à l'intervention en précisant : «Nous aurions préféré une voie alternative, mais à cette occasion il n'y en a pas. Les attaques ne concernaient pas un changement de régime ou une intervention dans une guerre civile mais qu'elles devaient empêcher l'utilisation d'armes chimiques par le gouvernement syrien».  
Missile MDCN

          Le président français Emmanuel Macron a également confirmé la participation de la France à l'attaque. Paris a indiqué de son côté que la France avait frappé avec des frégates multimissions en Méditerranée et des avions de chasse. Selon le président Emmanuel Macron, les frappes ont été «circonscrites aux capacités du régime syrien permettant la production et l’emploi d’armes chimiques». La France  a tiré pour la première fois des missiles de croisière navals de type MDCN, une arme très politique destinée à frapper un objectif fortement défendu et qui permet, depuis la mer, des frappes à terre dans la profondeur, à très longue distance et avec une grande précisionLa ministre des armées a précisé comment l’opération a été conduite côté français. Cinq frégates ont été impliquées avec des Rafales et des Mirages, partis de Métropole et ravitaillés en vol, dans une planification millimétrée. 

La frégate Aquitaine au large de Syrie

            La télévision publique syrienne a déclaré que les défenses anti-aériennes avaient abattu plusieurs missiles. L'ambassadeur de la Russie aux Etats-Unis a averti qu'il y aurait des conséquences après ces attaques : «Un scénario préconçu est en cours de mise en œuvre. Encore une fois, nous sommes menacés, nous avons averti que de telles actions ne seraient pas laissées sans conséquences. Insulter le président de la Russie est inacceptable et inadmissible. Les Etats-Unis - le détenteur du plus grand arsenal d'armes chimiques - n'ont aucun droit moral de blâmer les autres pays».
            A l’occasion de ces frappes, les Alliés ont été prudents car aucun missile n'est entré dans les zones de défense aérienne russe en Syrie. En revanche, le gouvernement syrien doute de l’efficacité de ces frappes car les sites ciblés avaient été évacués après une mise en garde de la Russie : «Nous avons eu un avertissement précoce de la frappe par les Russes et toutes les bases militaires ont été évacuées il y a quelques jours». Cependant les dommages matériels sont en cours d’évaluation après le tir de 30 missiles.

Nasra Al-Hariri

            Les réactions à cette attaque varient en fonction des protagonistes. Le chef du principal bloc de l'opposition syrienne, Nasra Al-Hariri, reste sceptique sur les conséquences de ces frappes : «Peut-être que le régime n'utilisera plus d'armes chimiques, mais il n'hésitera pas à utiliser les armes que la communauté internationale lui a permises, comme les bombes barils et les bombes à sous-munitions».
            La ministre de la Défense Florence Parly cherche à justifier la position de la France : «Nous ne cherchons pas la confrontation et refusons toute logique d'escalade, c'est la raison pour laquelle nous avons, avec nos alliés, assuré que les Russes étaient prévenus» tandis que le ministre des Affaires étrangères a déclaré que «l'opération militaire conjointe contre la Syrie est légitime, limitée et proportionnée». Il s’agit en effet de garder de bonnes relations avec les pays arabes. 
          Le président Trump apporte de son côté son explication sur les 100 frappes contre la Syrie sur un coup unique : «Nos actions de ce soir ont pour but d'établir un puissant moyen de dissuasion contre la production, la diffusion et l'utilisation d'armes chimiques». Les dirigeants démocrates américains ont salué avec prudence ces frappes.

            Les généraux américains ont précisé les trois principales cibles touchées. Un centre de recherche scientifique, situé dans le district de Barzeh, décrit comme un centre pour la recherche, le développement, la production et les essais d'armes chimiques et biologiques. La deuxième cible était une installation de stockage d'armes chimiques à l'ouest de la ville de Homs, représentant l'emplacement principal de l'équipement de production de sarin.  La troisième cible, qui se trouvait également près de Homs, contenait à la fois une installation de stockage d'armes chimiques et un poste de commandement. Les Syriens prétendent que les frappes ont détruit un centre d’apprentissage, des laboratoires mineurs et quelques dépôts de l’armée. Quatre avions Tornado de la Royal Air Force, utilisant des missiles Storm Shadow, ont pris part à l'attaque d'une base militaire près de Homs.
Frappes dans le ciel de Damas

            Washington avait informé Israël du moment précis de l’attaque ce qui a permis à Tsahal de prendre des mesures de protection adéquates en cas de représailles.  Mais les États-Unis n'ont pas prévenu Poutine des détails de l’opération. Cependant les forces russes en Syrie avaient été averties que des avions occidentaux seraient dans l'espace aérien syrien, sans leur révéler les sites cibles ou le calendrier à l'avance. Les Américains parlent pour le moment «d'un tir ponctuel pour envoyer un message très fort» ce qui implique qu'il n'y aura pas d'autres frappes dans l'immédiat.
            Les Syriens ont qualifié avec culot ces attaques de «violation flagrante du droit international montrant un mépris de la légitimité internationale. Les bonnes âmes ne seront pas humiliées» oubliant ainsi leur utilisation de gaz contre les populations civiles.

            La question ouverte reste les conséquences de cette frappe sur les relations des Occidentaux avec la Russie et la leçon que pourrait en tirer le régime de Bachar El-Assad. C'était l'action minimale que pouvaient lancer les Alliés sans se mettre à dos les Russes ni même les pays arabes. On connaîtra plus tard les conséquences de ces frappes mais un résultat est déjà probant : l'implication commune des trois alliés en Syrie et c'est un point positif pour Israël.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Alors que les journaux français tardaient à publier la nouvelle ce matin, ton article est de loin le plus détaillé et le plus documenté. Bravo Jacques et Shabat Shalom.

Marianne ARNAUD a dit…

Cher monsieur Benillouche,

Ainsi, au moment où force était de constater que l'armée de Bassad aidée de son allié russe, avait gagné la guerre de Syrie, où les derniers "rebelles" avaient quitté la Ghouta, fortement soupçonnés - comme à Alep - d'avoir perpétré cette attaque à l'armement chimique du 7 avril 2018, où les experts pour l'ONU de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) étaient enfin attendus ce samedi 18 avril en Syrie, c'est dans la nuit du vendredi au samedi que vous nous apprenez que les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France ont lancé leurs frappes aériennes punitives sur la Syrie - pays avec lequel ils ne sont pas en guerre - et que vous qualifiez de "point positif pour Israël". Mais qu'en est-il pour la France ? Vous ne vous avancez pas beaucoup !

Très cordialement.

2 nids a dit…

Oui, un très bon travail d'information

Pour ce qui concerne "les allies occidentaux", il aurait été souhaitable qu'ils visent également les Turcs au nord de la Syrie avec un beau missile dans le palais pharaonique d'Erdogan avec lui dedans et de bombarder les tunnels du hezbollah au Liban, là, les points sur les I auraient été mis, mais que d'attente pour si peu..

Marianne ARNAUD a dit…

Ouf, on a eu chaud, mais finalement les choses sont beaucoup plus claires ce matin !
L'attaque aérienne de la France sur la Syrie était une attaque pour rire ! Les Russes avaient été avertis qui avaient averti les Syriens depuis une semaine. Donc, mission accomplie, mais pas de morts civils ou militaires. La France n'a tiré que 12 missiles sur 105 ! Le président Macron a néanmoins gagné, après le président Hollande, ses galons de chef de guerre. Il viendra sans doute en parler aux Français, ce soir, au Théâtre national de Chaillot. Et inutile de lui faire remarquer que les Saoudiens continuent de tuer les Yéménites, ni que les Turcs continuent de tuer les Kurdes, car Le président Macron n'a jamais, que l'on sache, tracé de ligne rouge à l'Arabie Saoudite ou à la Turquie.

Jacques BENILLOUCHE a dit…

Chère Marianne,

Il ne s'agissait pas d'une attaque pour rire mais d'une attaque qui a détruit certaines structures de mort syriennes. C'est vrai que les Alliés ont "cassé" des pierres mais leur intention n'était pas de tuer des civils ni même des soldats d'Assad.

On ne saura rien des résultats car les Syriens, par fierté, minimiseront toujours les dégâts mais une chose est certaine, l'aspect symbolique restera grand. Si Assad persiste à gazer, c'est qu'il choisit la destrction physique de son pays. C'est la leçon à tirer.

Cordialement