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vendredi 8 avril 2016

La volte-face de Netanyahou par Gérard AKOUN



LA VOLTE-FACE DE NETANYAHOU

Par Gérard AKOUN

            

          L’arrestation du soldat franco-israélien accusé d’avoir achevé un Palestinien, auteur d’une attaque au couteau, d’une balle dans la tête alors qu’il gisait à terre, déjà blessé de plusieurs balles, divise profondément le pays. La vidéo diffusée par B’’Tselem, le 24 mars  montrait le  soldat israélien, armant son fusil d’assaut puis tirant dans la tête d’un Palestinien. A  priori cela ne faisait aucun doute, il s’agissait d’une bavure commise par un jeune soldat de 19 ans qui avait contrevenu aux consignes données par l’encadrement  militaire pour ouvrir le feu : ne tirer que s’ils sont en danger.



Soldat A.

            L’autopsie pratiquée par la suite, au début de cette semaine, a montré  que la mort du terroriste était due à ce dernier coup de feu tiré à bout portant.  Cet acte avait été  condamné dans les heures qui ont suivi par Benyamin Netanyahou qui avait  déclaré : «Ce qui s’est passé ne représente pas les valeurs de l’armée» et par le ministre de la défense Moshe Yaalon qui apportait un plein soutien au chef d’État-Major de Tsahal. Depuis la politique s’en est mêlée !!
            Sous la pression des hyper nationalistes religieux et de l’extrême droite de son gouvernement, le premier ministre a fait  machine arrière. Désavouant en quelque sorte les autorités militaires, il a assuré de son soutien les parents du conscrit en leur disant «en tant que père de militaire je comprends votre détresse, les soldats  doivent prendre des décisions en temps  réel, sous la pression et face à l’incertitude». Il faisait  référence aux attentats qui frappent les soldats israéliens en Cisjordanie, à Hébron, en particulier, et contre lesquels ils doivent se défendre  tout en essayant d’appliquer des consignes de modération,  qu’ils doivent respecter. 
Yaalon visé politiquement

            Une tension permanente pèse sur les épaules de ces gamins, la peur aussi et il n’est pas étonnant que certains puissent craquer et se livrer à des actes que la morale réprouve. Le premier ministre a rassuré la famille en ajoutant que : «l’enquête prendrait en considération toute la complexité de cette affaire». En s’exprimant ainsi, il exerçait une pression sur la justice, il faisait fi de la nécessaire séparation, dans une démocratie et Israël en est une, du pouvoir judiciaire et du  pouvoir exécutif. Mais il se trouvait en phase avec un sondage  du weekend dernier, dans lequel  57% des Israéliens estiment que le soldat n’aurait pas dû être arrêté et 68% que le chef d’État-major a eu tort de le condamner publiquement. Ces résultats confirment, s’il en était besoin, le virage à droite et même à l’extrême-droite de la société israélienne. La Cour Suprême était déjà vouée aux gémonies, c’est maintenant le commandement de Tsahal qui est remis en question.
Cour Suprême

            Certains s’étonnaient, ne comprenaient pas, mais  nous, nous étions fiers, qu’Israël puisse demeurer une démocratie malgré l’état d’urgence, l’état de guerre dans lequel il est plongé depuis des dizaines d’années, que les droits de la minorité arabe puissent être globalement respectés, que cette minorité soit représentée au Parlement et même à la Cour Suprême, malgré les attentats et les intifada successives. Les gouvernements de droite, qui s’étaient succédés  avaient réussi, eux aussi, à résister aux pressions de leurs extrémistes et à  maintenir le statu quo mais ce statu quo n’est plus possible.
            Des zélotes sont au pouvoir au sein du gouvernement, ils bloquent tout compromis avec les Palestiniens qui comporterait l’évacuation de certains territoires occupés ou même une évacuation unilatérale. Ce qui a été possible avec Sharon ne l’est plus aujourd’hui. Ils ont laissé s’installer une situation sans issue et les Palestiniens, qui savent pertinemment que le retour aux frontières de 1967, que le retour des réfugiés ne sont plus possibles, refusent se faisant toute négociation. Or il faut être deux pour négocier,  les Palestiniens ne le veulent pas ; ils laissent se poursuivre la guerre des couteaux. Les dirigeants des deux côtés, malheureusement, se satisfont de cette situation qui ne les oblige pas à faire les choix  décisifs.
Yaalon à la Knesset

            Les Israéliens doivent retenir cette déclaration de Moshe Yaalon à la Knesset au sujet du drame d’Hébron  et  qui a valeur d’avertissement : «Si nous perdons nos valeurs morales, nous allons perdre aussi la guerre contre le terrorisme».


5 commentaires:

Véronique ALLOUCHE a dit…

Monsieur Akoun, une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec votre article. Rien à ajouter de plus, vous avez tout dit.
Bien cordialement
Véronique Allouche

Marianne ARNAUD a dit…

Et en même temps, comment ne pas voir qu'un jeune homme de 19 ans est jeté en pâture aux politiques, par ceux-là même qui lui ont mis un fusil entre les mains, au motif qu'il avait "contrevenu aux consignes" ?

Véronique ALLOUCHE a dit…

@marianne
Marianne, imaginez le même scénario en France. Un militaire qui tuerait à bout portant un terroriste à terre et de surcroît blessé. Toute la classe politique, gauche en tête, s'insurgerait. J'imagine le peuple dans la rue chauffé à blanc par les médias et les "droits de l'hommiste", par tous ceux qui acceptent la protection des militaires mais qui refusent la déchéance de nationalité au motif de "pas d'amalgame". La récupération politique serait de mise, comme elle l'est en Israël. Ceci dit concrètement, un homme portant une arme doit en avoir la maîtrise même s'il n'a que 19 ans. Il aura sans doute une peine relative mais ne pas le juger serait la porte ouverte à toutes sortes de dérives. La démocratie ne doit pas permettre ce genre de bavure.
Bien cordialement
Véronique Allouche

AMMONRUSQ a dit…

Bien sur que vous n'avez pas tord et cela ne changeras pas mon amour profond pour cette armée,19 ans ou pas quand un salopard vient de louper votre copain,vous ne tenez pas à être le second en joue.

Lors de mon service militaire,cette problématique revenait régulièrement et les gens qui nous avaient "instruits"du métier des armes,avaient presque tous connus des moments pareils,j'ajoute que c'était dans une compagnie de combat de l'armée française:3è RIMa.

Les déclarations sont ce qu'elles sont,mais laissons faire l'armée car les déclarations politiques n'arrange rien.Pour ma part je soutient ce soldat.

Marianne ARNAUD a dit…

Chère Véronique,

Je n'ai pas le moindre doute que si le même scénario se déroulait en France il en serait autrement qu'en Israël. Mais je n'en reste pas moins persuadée que les politiques qui, comme chacun peut le constater en ce moment, transgressent les lois de la morale sans vergogne, la plupart du temps par cupidité ou pour asseoir ou consolider leur pouvoir, sont bien mal placés pour donner des leçons aux militaires qui prennent tous les risques - y compris celui de perdre leur âme - quand il s'agit de défendre la vie de leurs concitoyens.

Très cordialement.