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jeudi 10 mars 2016

Syrie : une trêve contestée et fragile



SYRIE : UNE TRÊVE CONTESTÉE ET FRAGILE

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps


« Celui qui croyait au ciel
  Celui qui n'y croyait pas »

            
Staffan de Mistura

          La fin des hostilités en Syrie permet une nouvelle respiration dans la région mais chaque clan interprète à sa façon  le cessez-le feu entré en vigueur le 27 février. La date des négociations prévue pour le 10 mars vient d’être à nouveau reportée. Selon l'émissaire de l'ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, elles ont été ajournées au 14 mars. Le retard est imputable aux hésitations de la faction de l’opposition pro saoudienne qui n'a pas encore pris position sur sa participation ou non à des pourparlers indirects organisés à Genève sous l'égide de l'ONU.




Front al-Nosra

            Selon l’agence russe Spoutnik, la délégation gouvernementale syrienne a été conviée le 14 mars à Genève pour participer aux négociations. Mais la trêve en vigueur en Syrie ne s'applique pas au Front al-Nosra (branche syrienne d'Al-Qaïda), ni à Daesh et ni autres groupes qualifiés de terroristes par le Conseil de sécurité de l'Onu qui pourront continuer à se battre et à attaquer. C’est pourquoi l'armée syrienne a détruit les positions de l’État islamique à l'ouest de la cité antique de Palmyre (Tadmor). Selon l’agence russe Spoutnik : «L'armée et des groupes de volontaires syriens ont progressé de 4 kilomètres vers Al-Qaryatayn. Ils ont pris le contrôle d'une hauteur près de cette localité. L'offensive se poursuit, appuyée par l'artillerie».
Palmyre

            La campagne militaire, lancée avec le soutien des frappes aériennes russes, rencontre une résistance farouche de la part de Daesh qui a mobilisé toutes ses forces. Les djihadistes s'étaient emparés de Palmyre il y a près d'un an en y détruisant plusieurs sites inscrits sur la liste du patrimoine culturel mondial de l'UNESCO dont l'Arc de triomphe qui était le symbole de Palmyre.
            Staffan de Mistura est confiant après la cessation des hostilités négociée par les Russes et les Américains. Il y a un mois les pourparlers de paix ont été suspendus lorsque l’opposition syrienne décida de les boycotter. Une certaine accalmie résiste, bien qu’elle soit fragile. L’intensité des combats diminue et les Américains considèrent qu’il n'y a eu que des violations négligeables du cessez-le-feu. Pour montrer sa bonne volonté, Bachar Al-Assad a décidé de venir au secours des populations assiégées, y compris dans les zones contrôlées par les rebelles. Le ministère russe de la défense confirme que 4,2 tonnes d'aide humanitaire ont été distribuées aux habitants de la ville d'El-Tell, dans la province de Damas. L’ONU estime que 450.000 personnes sont piégées à travers le pays et qu’elle a réussi à atteindre 150.000 assiégées.

            Mais le scepticisme persiste car l’accord exclut l’État islamique (Daesh) et Jabhat al-Nusra (JAN), branche syrienne d'Al-Qaïda qui s’appuie sur des groupes rebelles soutenus par les États-Unis. Cela crée un désordre puisque le régime syrien attaque toujours les points chauds occupés par des groupes censés être exclus de l’accord. Il peut difficilement cibler uniquement quelques éléments particuliers car ils sont enchevêtrés sur le terrain. Ainsi dans la province rebelle d’Idlib, l’ASL (armée syrienne libre) soutenue par l’Occident, Ahrara al-Sham et Jabhat al-Nusra (JAN) contrôlent la région. 

          L’aviation russe les frappe sans pouvoir distinguer le clan qui est visé. Ce fut le cas lorsque les Russes ont frappé à Alep pour permettre à l’armée régulière syrienne, appuyée par le Hezbollah et les Gardiens iraniens de la Révolution,  d’organiser le siège d’Alep. Mais le combat à l’intérieur de la ville est exclu car les forces rebelles, qui y dominent, ne peuvent être neutralisées qu’à la suite d’un combat de rue auquel les Syriens ne sont pas préparés. Les Russes, bien qu’ils aient moins de scrupules, peuvent difficilement user de bombes guidées dans une ville où les civils sont en majorité. Ils ont donc décidé de verrouiller la ville pour l’affamer.

            Mais la clef du plan est détenue par les Kurdes qui pourront seuls couper les routes d’approvisionnement au nord de la Turquie. Ils acceptent de le faire à condition de ne pas être attaqués. Encore faut-il que la Turquie ne s’immisce pas dans le conflit en empêchant les Kurdes de contrôler la frontière nord ; or elle compte bien les bloquer dans leurs actions militaires. On voit mal tous ces protagonistes parvenir à un accord à Genève, surtout si les plus concernés ne sont pas admis à la table des négociations. La pause dans les combats sera de courte durée, le temps pour les belligérants  d’affûter à nouveau leurs armes.


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